La collégiale de Neuchâtel prise pour cible au cœur d’une série de tags

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La collégiale de Neuchâtel prise pour cible au cœur d’une série de tags

Ce week-end, la façade sud du bâtiment remontant au XIIe siècle a subi des dégradations, comme plusieurs autres édifices publics de la ville. Ces inscriptions, qui mêlent symboles antireligieux, slogans anticapitalistes et appels à la libération de la Palestine, suscitent l’émotion.

Slogans anticapitalistes, antifascistes ou en faveur de l’Intifada… La collégiale de Neuchâtel a été recouverte de tags réalisés dans les nuits de jeudi à dimanche, mêlant revendications politiques et attaques antireligieuses. «On dénombre une bonne dizaine d’inscriptions sur la face sud de notre église», rapporte Florian Schubert, pasteur référent du lieu, visiblement choqué par ces dégradations. Propriété de la ville, le bâtiment a également été marqué par des inscriptions telles que «Eat the Pope» («Mangez le pape») ou encore des références satanistes comme des pentagrammes inversés dessinés sur les portes de l’édifice protestant. 

«Il est clair que nous avons été visés en tant que chrétiens, mais le message ne semble ni structuré, ni réfléchi», estime Florian Schubert. Selon lui, ces tags, qui relèvent pour la plupart de combats identifiés à gauche ou à l’extrême gauche, veulent mêler de façon confuse l’Eglise et le nationalisme d’extrême droite. «On sent une méfiance ou une hostilité envers une certaine vision du christianisme perçu comme identitaire, comme on peut l’observer aux Etats-Unis ou dans certains discours politiques en France.»

Du «gloubi-boulga» politique

Des tags similaires – notamment le slogan «Free Palestine» et des messages anticapitalistes – ont été relevés à plusieurs endroits de la ville et à Marin: sur la passerelle de l’Utopie, des bornes Tesla, le Temple du Bas, le Collège latin, une sculpture du parc des Jeunes-Rives, ainsi que sur les murs d’une autre institution publique, le Musée d’ethnographie. Contactée, l’administration de ce dernier précise toutefois que les inscriptions ne semblent pas viser spécifiquement la mission ou le contenu du musée.

Pour la Verte Nicole Baur, présidente du Conseil communal, c’est le constat matériel qui prime: «La collégiale est un joyau, rénové en 2022. Le nettoyage de la pierre d’Hauterive est complexe, coûteux et délicat.» Une plainte pénale sera déposée une fois le recensement des sites touchés achevé. L’élue déplore les dégâts causés au patrimoine. Quant aux inscriptions, elle les qualifie de «gloubi-boulga» d’expressions contestataires», rendant toute interprétation cohérente difficile.

Parmi les slogans les plus visibles, un appel à la libération de la Palestine, réalisé au pochoir, parcourt désormais la ville de Neuchâtel, suscitant de vives réactions. «Ces tags n’ont rien à voir avec notre cause, c’en est même insultant», réagit Françoise Jaquet, présidente du collectif Action Palestine Neuchâtel. «Nos actions sont pacifiques et ne visent jamais des lieux de culte.» Florian Schubert condamne à son tour cet usage de la cause palestinienne: «Peut-être ont-ils utilisé un combat socialement soutenu pour faire le buzz. C’est un amalgame injuste.»

Une réponse à construire

La police cantonale confirme l’ouverture d’une enquête. «Il est encore trop tôt pour établir des liens entre les différents tags, mais l’ampleur de l’action est inhabituelle», précise Elsa Girardin, chargée de communication. Le phénomène reste rare dans le canton, ce qui renforce l’étrangeté de l’affaire. «S’il ne s’agit sans doute pas uniquement de vandalisme gratuit, le message véhiculé par ces inscriptions reste pour l’heure difficile à déchiffrer.»

Face à cette série de dégradations, le Conseil communal et la paroisse réformée vont réfléchir à de possibles mesures. «Nous discuterons avec la commune pour demander que notre lieu de culte et son esplanade soient mieux protégés», confie Florian Schubert. «Des rondes policières seraient bienvenues, mais je suis personnellement opposé aux caméras.» Même prudence du côté de l’exécutif: «Généraliser la vidéosurveillance n’est pas la solution, ce n’est pas notre politique», observe Nicole Baur. Et de conclure en précisant que «les services de la ville et du canton sont déjà à pied d’œuvre pour effectuer les travaux de nettoyage, espérant que l’enquête policière permettra de découvrir qui sont les auteurs de ces déprédations».